Boualem Sansal

Boualem Sansal pour Atlantico : « Jean-Luc Mélenchon déteste la France (…) Il n’y aura pas de 6e République, et s’il y en une elle sera islamique ou semi islamique… ce qu’elle est déjà un peu »

Atlantico : Un certain nombre de figures politiques de confession musulmane ou de culture arabo-musulmane ont préféré ne pas dénoncer l’antisémitisme depuis le 7 octobre et l’attaque du Hamas sur Israël. Comment l’expliquer ? Peut-on parler de faute politique ?

Boualem Sansal : Il n’y a pas d’électrons libres dans la communauté musulmane, encore moins à ce niveau de représentation. Ces personnalités sont toutes d’une manière ou d’une autre liées à des organisations islamiques nationales et/ou étrangères, ou des Etats, Leur silence signifie qu’elles n’ont pas reçu l’autorisation de s’exprimer et les éléments de langage afférents ou qu’on leur a demandé de ne pas intervenir à chaud dans l’arène. Le mini drame entre le recteur de la Grande Mosquée de Paris et un de ses imams, qui contestait la véracité du nombre d’actes antisémites depuis le 7 octobre, qui a ridiculisé la Grande Mosquée de Paris et au-delà sa tutelle l’Algérie, est sans doute pour quelque chose dans la réserve observée. Il faut dire qu’il est difficile de se positionner et d’intervenir dans le débat public tant la situation est explosive. On observe que le gouvernement français, à commencer par Macron lui-même, s’exprime de manière très précautionneuse, en disant tout et son contraire pour plaire à tous et calmer le jeu. Le conseil « Dans le doute abstiens-toi », a beaucoup d’adeptes en ce moment. Je trouve cela bête car ils peuvent se voir appliquer l’autre formule « Qui ne dit rien consent ». Le mieux est donc de parler quitte à dire qu’on ne sait que penser tant la situation est complexe. Appeler à la prudence est un classique en politique pour être présent et ne rien dire.

(…)

Jean-Luc Mélenchon cultive-t-il le vote musulman ? Peut-on parler d’une tentative de “hold-up” du leader de la France Insoumise sur l’électorat musulman ?

(…) Mélenchon déteste la France, il méprise tout le monde et n’a d’yeux que pour lui-même et de rêve que celui d’exploser la France pour, espère-t-il, apparaître comme le recours. Quelque part il est très gaullien, sans l’envergure de l’ombre du Général. Il vit dans le passé, dans le rêve et la forfanterie. Il faut le lui dire, le régime de la France restera ce que la 5e république a voulu qu’il soit. Il n’y aura pas de 6erépublique, et s’il y en une elle sera ou islamique, ce qui signera la mort de la France, ou semi islamique ce qu’elle est déjà un peu, qui n’inquiète guère en haut lieu, l’essentiel est que Colombey-les-deux-Eglises reste Colombey-les-deux-Eglises, à tout le moins, Colombey-la-dernière-Eglise. (…)

Une femme courageuse

Fawzia Zouari, écrivaine, journaliste tunisienne,
docteur en littérature française et comparée de la Sorbonne,
a publié cet article ras-le-bol dans Jeune Afrique 


Il y a des jours où je regrette d’être née arabe. Les jours où je me réveille devant le spectacle de gueules hirsutes prêtes à massacrer au nom d’Allah et où je m’endors avec le bruit des explosions diffusées sur fond de versets coraniques. Les jours où je regarde les cadavres joncher les rues de Bagdad ou de Beyrouth par la faute des kamikazes ; où des cheikhs manchots et aveugles s’arrogent le droit d’émettre des fatwas parce qu’ils sont pleins comme des outres de haine et de sang ; où je vois des petites filles, les unes courir protéger de leur corps leur mère qu’on lapide, et les autres revêtir la robe de mariée à l’âge de 9 ans.

Et puis ces jours où j’entends des mamans chrétiennes confier en sanglotant que leur progéniture convertie à l’islam refuse de les toucher sous prétexte qu’elles sont impures. Quand j’entends pleurer ce père musulman parce qu’il ne sait pas pourquoi son garçon est allé se faire tuer en Syrie. À l’heure où celui-ci parade dans les faubourgs d’Alep, kalachnikov en bandoulière, en attendant de se repaître d’une gamine venue de la banlieue de Tunis ou de Londres, à qui l’on a fait croire que le viol est un laissez-passer pour le paradis.

Ces jours où je vois les Bill Gates dépenser leur argent pour les petits Africains et les François Pinault pour les artistes de leur continent, tandis que les cheikhs du Golfe dilapident leur fortune dans les casinos et les maisons de charme et qu’il ne vient pas à l’idée des nababs du Maghreb de penser au chômeur qui crève la faim, au poète qui vit en clandestin, à l’artiste qui n’a pas de quoi s’acheter un pinceau. Et tous ces croyants qui se prennent pour les inventeurs de la poudre alors qu’ils ne savent pas nouer une cravate, et je ne parle pas de leur incapacité à fabriquer une tablette ou une voiture. Les mêmes qui dénombrent les miracles de la science dans le Coran et sont dénués du plus petit savoir capable de faire reculer les maladies. Non ! L’Occident, ces prêcheurs pleins d’arrogance le vomissent, bien qu’ils ne puissent se passer de ses portables, de ses médicaments, de ses progrès en tous genres.

Et la cacophonie de ces « révolutions » qui tombent entre des mains obscurantistes comme le fruit de l’arbre. Ces islamistes qui parlent de démocratie et n’en croient pas un mot, qui clament le respect des femmes et les traitent en esclaves. Et ces gourdes qui se voilent et se courbent au lieu de flairer le piège, qui revendiquent le statut de coépouse, de complémentaire, de moins que rien ! Et ces « niqabées » qui, en Europe, prennent un malin plaisir à choquer le bon Gaulois ou le bon Belge comme si c’était une prouesse de sortir en scaphandrier ! Comme si c’était une manière de grandir l’islam que de le présenter dans ses atours les plus rétrogrades.

Ces jours, enfin, où je cherche le salut et ne le trouve nulle part, même pas auprès d’une élite intellectuelle arabe qui sévit sur les antennes et ignore le terrain, qui vitupère le jour et finit dans les bars la nuit, qui parle principes et se vend pour une poignée de dollars, qui fait du bruit et qui ne sert à rien !

Fawzia Zouari